La lettre d’Ariane à Thésée fait résonner la voix de l’héroïne à l’endroit où elle fut abandonnée par Thésée après l'avoir aidé à sortir du labyrinthe où était enfermé le Minotaure, au sommet d’une île battue par les vents. De cette île déserte Ariane écrit à Thésée, elle livre le récit de son abandon, comment elle s’est réveillée ce matin-là, un beau matin de printemps, seule. Ce doute affreux qui la saisit, son errance panique sur le rivage jusqu’à cette course éperdue jusqu’au sommet de l’île pour voir et savoir enfin ce navire qui part sans elle avec à son bord cet homme qui avait juré de l'aimer toujours et qui ne se retourne même pas.
Il s’agit d’installer le portique à marée descendante sur l’estran et de jouer le spectacle quand la mer est au plus bas pour ensuite démonter et laisser place à la marée montante.
L'estran est un endroit qui n’appartient pas, parce qu’il est tantôt visible tantôt invisible c’est aussi le lieu de l’imaginaire. En amenant le récit mythologique de la Lettre d’Ariane à Thésée à cet endroit on inscrit le texte d’Ovide dans un espace atemporel. L’estran devient alors une scénographie éphémère. Jouer entre deux marées participe ainsi à la dramaturgie du texte qui devient décor, personnage, matière, voix, traversée.
Par ce dispositif on amène le public à voir l’estran et un paysage familier comme le théâtre d’une histoire et on produit une distorsion du regard, c’est-à-dire l’irruption du merveilleux dans le réel comme s’il y avait une faille dans la matière. Le lieu familier devient le lieu d’un récit qui s’y déploie et dans lequel le spectateur, témoin et observateur pris dans l’intimité de quelque chose en cours, est transporté le temps d’une marée.
Quelques heures plus tard tout sera recouvert, rendu à la mer.
Avec Hélène BOU (création - interprétation corde et voix) et l’estran (scénographie).
article Ouest-France 11/09/2023
article Le Télégramme 11/09/2023
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